Nous allons parler des distorsions cognitives qui sont des raccourcis que prend le cerveau. Ces raccourcis nous permettent d’économiser de l’énergie mentale, et nous les « commettons » tous.
C’est toujours au
cours de discussion, de conversation que sont révélées nos distorsions. Elles
nous limitent, et nous maintiennent dans nos schémas récurrents et nos
croyances. Elles ne sont pas nécessairement en lien avec notre passé, même si
la psychanalyse voudrait nous le faire croire.
Une fois encore… je vous conseille de ne JAMAIS intervenir sur les distorsions cognitives pendant une conversation si ces dites distorsions ne bloquent pas la conversation.
Ce recadrage doit
être réaliser sans violence et sans jugement.
Je vous propose de
simplement poser des questions ouvertes. Une question ouverte est une question
qui nécessite une réponse développée.
La question fermée
est une réponse qui nécessite une réponse en OUI ou NON.
Le recadrage des
distorsions cognitives et un travail qui peut sembler ardu car en général ces
distorsions font partie intégrante du raisonnement de la personne. Ne vous
acharnez pas. Le simple fait de poser une, voire deux questions peut déjà
construire de la réflexion chez votre interlocuteur.
Cette réflexion
peut évoluer en dehors de chez-vous, après la séance. Le cerveau de la personne
(son subconscient?) va continuer à « travailler » sur ce doute
inséré, planté par votre ou vos questionnements.
Voici des questions
« types » à poser lorsque vous avez détecté une distorsion cognitive
qui serait problématique, ou qui ralentirait la progression de votre client
dans son accompagnement.
Vous pouvez les
modifier à votre guise, mais fonctionnent énoncées telles quelles.
Pour aider
l’interlocuteur à sortir de la catastrophisation, vous pouvez demander :
- Quels faits
tangibles justifient vos conclusions ?
- Quels faits
tangibles invalident vos conclusions ?
- Quel point de vue
plus crédible vous pourriez adopter face à cet évènement ?
- Quelles
conclusions moins terribles pourriez-vous tirer de cet événement ?
- Comment pourriez-vous
changer cette situation ?
Pour aider
l’interlocuteur à penser entre les extrêmes :
- N’accordez-vous
pas trop d’importance à un seul aspect de cet événement ?
- Quelle note
appropriée pourriez-vous donner à cet aspect de l’événement sur une échelle de
1 à 10 ?
- Quels sont les
autres aspects de cet événement qui vous permettraient de voir les choses de
façon plus réaliste, ou plus crédibles ?
Pour aider
l’interlocuteur à avoir une pensée plus souple :
- Est-ce que vous
acceptez que d’autres personnes aient leurs propres règles et suivent leur
libre arbitre ?
- Est-ce que votre
exigence est crédible face à la réalité ?
- Est-ce que cette
exigence est vraiment utile pour vous ?
- Que se
passerait-il si vous changiez vos exigences en préférences ?
Pour aider
l’interlocuteur à penser sans sa boule de cristal :
- Comment
pourrie-vous tester votre prédiction ?
- Comment
savez-vous cela ? Quelles sont les preuves de votre prédiction ?
- Que pourriez-vous
gagner en prenant le risque d’agir malgré votre prédiction ?
- Comment
pourriez-vous agir s’il y avait une issue défavorable ?
Pour aider
l’interlocuteur à ne plus être télépathe :
- Concernant vos
suppositions, quelles autres explications vous pourriez imaginer ?
- Comment
savez-vous que vous avez raison dans votre prédication ?
- Comment vous
pourriez procéder pour tester votre prédiction ?
Pour aider
l’interlocuteur à privilégier les faits plutôt que les émotions et les
sentiments :
- Est-ce que les
sentiments que vous éprouvez pourraient être à l’origine de ce que vous
croyez ?
- Quels faits
pourraient être ignorés à cause de vos ressentis difficiles ?
Pour aider
l’interlocuteur à penser de manière plus précise, plus réaliste :
- N’êtes-vous pas
en train de poser un jugement total sur vous-même ou sur les autres en vous
fondant sur un seul élément ?
- Existe-t-il des
aspects vous concernant, ou concernant les autres, que vous ignorez ?
- Qu’est-ce que ça
changerait dans votre vie si vous étiez plus précis dans vos jugement ?
Pour aider
l’interlocuteur à moins juger :
- Est-ce que vous
trouvez honnête de votre part de vous coller cette étiquette ? Ce
jugement ?
Pour aider
l’interlocuteur à supporter de la frustration :
- Cette situation
est-elle vraiment intolérable ou insupportable ?
- Pour quelles
raisons vous pourriez supporter cet inconfort ?
- que risquez-vous
sincèrement à supporter cette frustration ?
Autres
questions :
- Quelles autres
raisons pourraient justifier ce qui s’est passé ?
- Quelle est la
différence entre une supposition et un fait ?
LE RAISONNEMENT DICHOTOMIQUE
La première
distorsion que je vous présente ici s’appelle le raisonnement
dichotomique, ou l’art de penser en « tout ou rien » ou en
« blanc ou noir ». C’est noir ou c’est blanc, ça ne peut pas être
gris !
Lorsque la personne
est dans cette erreur de pensée, ou distorsion cognitive, elle
oublie qu’il existe toujours une version
« intermédiaire » de ce qu’elle pense, même si elle y croit
fermement.
Voici des exemples
de ce que pourrait déclarer celui ou celle qui pense de manière
dichotomique :
« J’ai raté
mon examen de conduite, je suis un incapable » ou bien : « Mon
cœur bat très fort, je vais faire une crise cardiaque » ou bien
encore : « J’ai mal à la tête, c’est sûrement un AVC qui
s’annonce ».
N’y a-t-il pas d’intermédiaires
possibles à toutes ces pensées ?
Est-ce que toutes
les personnes qui ratent un examen sont des incapables ?
Un cœur qui bat
fort ne peut-il pas simplement être le signe d’une anxiété passagère, ou d’une
montée d’adrénaline ? Ne vous est-il jamais arrivé d’avoir le cœur qui bat
vite et fort avant aujourd’hui, sans être victime d’un arrêt cardiaque pour
autant ? Toutes les personnes qui sentent battre leur cœur ont-elles
systématiquement un arrêt cardiaque ?
Peut-on souffrir
d’une migraine sans que celle-ci soit annonciatrice d’un accident vasculaire
cérébral ?
Lorsqu’on se
reconnaît dans la pensée dichotomique, il est toujours intéressant et
utile de rechercher, soi-même, des raisons intermédiaires à ce qu’on pense ou
qu’on croit. Et surtout, se souvenir, que les pensées ne sont pas des faits.
LA
PERSONNALISATION, ou l'art de penser que nous sommes le centre du monde.
Cette erreur de
pensée est courante, tout le monde en est « victime » sans même s’en
rendre compte. Elle consiste à se focaliser sur un événement survenu
et le relier directement à nous.
Exemple :
« Ma
grand-mère est morte ce matin, elle ne serait pas morte si j’avais été
davantage présente auprès d’elle ces derniers mois ».
« J’ai rêvé
que nous allions nous séparer, sans ce foutu rêve nous serions toujours
ensemble, et heureux ».
On oublie
clairement que beaucoup de raisons diverses et variées peuvent être en cause
dans le fait qu’une vieille dame soit décédée à son domicile, et qu’une rupture
ait eu lieu.
LA SURGENERALISATION
Cette erreur de
pensée consiste à choisir des événements négatifs particuliers et des
circonstances uniques et à en tirer des conclusions
générales « universelles ». C’est croire que tel événement, ou
telle situation, arrive partout.
Exemple :
« Ce garçon
n’a pas accepté mon invitation, je savais bien que je ne plairais jamais à
personne ! »
« Je n’ai
jamais vécu un seul bon moment de toute ma vie ! »
La
surgénéralisation porte bien son nom. On vit un moment difficile, ou tout du
moins désagréable, et on le généralise. En effet, les questions qui pourraient
être posées dans ces cas précis sont :
Est-ce que le fait
qu’un garçon refuse mon invitation est la preuve formelle qu’aucun autre garçon
n’acceptera jamais une de mes invitations ?
Est-ce que je sais
lire dans l’avenir pour m’exprimer ainsi ?
Jamais un seul bon
moment de toute ma vie ? Vraiment ? Pas le moindre bon moment ?
Je n’ai jamais apprécié un repas ? Pris du plaisir en prenant une
douche ? Pris du plaisir en discutant avec mes amies ?
LE FILTRAGE
MENTAL
C’est une tendance
à s’attarder sur les détails négatifs d’une situation, amenant à
percevoir l’ensemble de cette situation comme négative. Ne retenir qu’un détail
d’un événement, puis l’interpréter en dehors de son contexte.
Il s’agit d’une
abstraction sélective qui nuit fortement au dialogue interne.
Exemple :
« Ce repas
était nul, parce qu’il n’y avait plus de mousse au chocolat pour le
dessert ! » « Cette randonnée en forêt était nulle, car sur la
fin, j’ai entendu des chasseurs au loin ! »
La personne qui vit
un filtrage mental fait un « zoom » sur le négatif et gomme le
positif.
LA
DRAMATISATION ET LA MINIMISATION
C’est amplifier
l'importance de ses erreurs et de ses lacunes. Ou bien celles des autres,
comme un ami ou un collègue de travail. C’est considérer un événement
désagréable mais banal comme étant une véritable catastrophe.
La minimisation
c’est, au contraire, minimiser ses points forts et ses réussites ou
considérer un événement heureux comme banal.
Exemple pour la
dramatisation :
« Julien n’a
pas été capable de rendre le dossier « 1 » à l’heure, c’est un
collègue sur lequel on ne peut pas compter ! »
« Mon oncle a
bu un verre de trop à cette réunion familiale, pourtant je croyais que c’était
quelqu’un de bien ! »
Exemple pour la
minimisation :
« En effet,
j’ai eu le poste. A mon avis, ils l’auraient donné à n’importe
qui ! »
DISQUALIFICATION
DU POSITIF (une suite à la minimisation)
C’est transformer
une expérience positive ou neutre en quelque chose d’absolument négatif.
Par exemple :
« Laura m’a dit que
j’étais gentil, en fait elle doit avoir pitié de moi. »
LE RAISONNEMENT
ÉMOTIONNEL
Cette distorsion
cognitive crée généralement beaucoup d’angoisse en nous. Elle consiste
à raisonner face à une situation, en fonction de ce que nous
ressentons comme émotion. « J’ai peur, c’est la preuve que ma
situation est effrayante » « Je suis jalouse, c’est bien la preuve
qu’il va finir par me tromper ».
En effet, on
retrouve abondamment cette distorsion dans les problématique de jalousie.
Exemple :
« Si je suis
jalouse, c’est parce que mon compagnon a la secrète intention de m’être
infidèle, au moment où je m’y attendrai le moins ! Sinon, je ne serai pas
jalouse ! »
La crainte d’être
trompé n’est pas la preuve que la tromperie va survenir. C’est l’angoisse de la
tromperie qui crée la jalousie, pas la situation vécue. Et c’est là où se
trouve l’erreur de raisonnement. Les affects (qui regroupent émotions et
sentiments) influencent le système de raisonnement, on prend alors notre
raisonnement pour une preuve rationnelle. D’une certaine manière, ce n’est pas
notre raison qui s’exprime, mais nos affects. Ça donne un raisonnement
émotionnel.
LES FAUSSES
OBLIGATIONS (DEVRAIENT, DOIVENT ET FAUDRAIT)
A mon
sens, les faussent obligations, sont les erreurs de pensées qui nous
éloignent le plus de la réalité, de la rationalité.
Se donner des
fausses obligations, c’est avoir des attentes sur ce que l’on devrait être,
faire, et sur ce que les autres devraient être ou faire, sans tenir compte de
la réalité, de nos capacités et de celles des autres, et des ressources
disponibles dans la situation.
Exemple :
« Tu devrais me
parler sur un autre ton, car je déteste que l’on me parle ainsi ! »
« Je dois laver la voiture aujourd’hui ! » « Tu n’aurais
pas dû prendre l’autoroute pour te rendre chez ton oncle ! »
Ces fausses
obligations génèrent automatiquement de la culpabilité et des sentiments de
frustration, de colère et de ressentiment.
Et il y a-t-il une
loi qui déclare que l’on devrait parler sur tel ou tel ton ? Il y a-t-il
une autre loi à ne surtout pas franchir qui prétend que les voitures devraient
être lavées tel jour à telle heure ! » Que ressentiriez-vous si vous
remplaciez les mots « devrait », « falloir », par
« j’aurais préféré », « je désire que… » ou encore
« j’aurais souhaité que… » ? Car il est clair que le monde ne
fonctionne pas selon nos propres règles ! C’est une difficile réalité qui,
une fois acceptée, n’est plus une difficulté.
L’ÉTIQUETAGE
« Étiqueter »
est le fait de « déposer » un jugement définitif sur une
personne, sur soi-même, sur un événement ou une situation. C’est catégoriser,
cataloguer. Cette distorsion est très présente chez les personnes qui manquent
de confiance en eux, et chez les colériques. Si l’on trouve qu’une personne est
« mauvaise », ou « inutile », il est clair qu’on ressentira
de la colère envers elle. Au contraire si l’on se dit qu’en cette occasion,
bien spécifique, cette personne a mal agit, ça ne remet pas en cause la
totalité de sa personnalité. Nos sentiments envers elle ne seront pas les
mêmes, ils seront moins intenses. En n’étiquetant pas les autres ou les
situations, nous nous sentons mieux.
Exemple :
« Le monde est
dangereux ! » « Je suis nul ! » « Cette personne
est mauvaise ! »
Le monde est-il
dangereux partout ? Y compris quand vous êtes dans votre lit avec la
personne que vous aimez ? Non, bien-sûr, le monde possède différentes
facettes, il est plus ou moins dangereux selon les endroits, les régions, les
pays…
Etes-vous
réellement nul parce que vous n’avez pas réussi votre examen ? Vous étiez
peut-être fatigué ? Ou dans de mauvaises dispositions ce jour-là ?
C’est possible, non ? Vous pouvez rater un examen sans perdre votre
valeur. Qui a déterminé qu’échouer dans ses études, par exemple, est une preuve
de nullité ? Est-ce rationnel de penser que rater un examen est un échec
existentiel ?
Peut-être cette
personne a-t-elle mal réagi pour des raisons qui vous dépassent ? Des
raisons personnelles ? Et qu’en dehors de cette situation, c’est une
personne honnête, peut-être même attachante ? La connaissez-vous
suffisamment pour la catégoriser ainsi ? La connaissez-vous
personnellement, intimement ?
Nous amalgamons
souvent l’ACTION avec LA PERSONNE qui commet ou réalise cette action. Peut-être
devrions-nous accepter l’existence de degrés. Vous, comme tous les êtres
humains, possédez diverses facettes. Beaucoup de facettes.
Dans la même
lignée, il y a la conclusion hâtive.
CONCLUSION HÂTIVE
La conclusion
hâtive est une conclusion tirée sans aucune preuve évidente. Elle est anxiogène
car elle a un impact important sur nos pensées et nos comportements. Et sur les
pensées et les comportements que nous aurons dans le futur avec le sujet en
question.
Exemple :
« Cet homme a l’air
malhonnête ! » Le connaissez-vous suffisamment, là encore, pour tirer de telles
conclusions ?
Autre
exemple :
« Regarde
cette jeune femme, et sa coiffure. Ce doit être une sacrée
bourgeoise ! »
On croit souvent
que nos intuitions sont correctes. Mais les vérifions-nous suffisamment ? D’un
point de vue cérébral, nos intuitions ne sont pas fiables. Et même si, dans de
nombreux cas, elles étaient bonnes, est-ce la preuve qu’elles le seront à
chaque fois, dans chaque nouvelles situations ? Non, bien-sûr, on ne peut
pas savoir. Alors tirer une conclusion, sans preuve concrète, sur une
intuition, nous propulse dans une position d’étiquetage.
Il y a
aussi la télépathie. La télépathie, c’est croire que nous savons ce que
les autres pensent, sans aucune preuve.
Exemple :
« Il ne m’a pas
serré dit bonjour, c’est parce qu’il me déteste. »
Peut-être a-t-il
d’autres préoccupations que vous. Peut-être subie-t-il des pressions dont vous
n’avez pas connaissance ? Tentez d’envisager d’autres possibilités. En
quoi le fait qu’il ne vous a pas dit bonjour est la preuve formelle qu’il vous
déteste ? Où se situe le lien logique ? Concrètement, il n’y en a
aucun.
Et puis il y
a la divination. La divination consiste à faire des prédictions sur le
futur et y croire fermement, comme s’il s’agissait d’un fait vérifiable.
Exemple :
« Je vais rester
célibataire toute ma vie ! »
C’est une
supposition. Et une supposition n’est pas un fait. Donc, n’est pas une réalité.
Pensez bien que nous possédons deux systèmes de réflexion. Un système intuitif
et un système rationnel. Le système intuitif est le moins fiable des deux, car
il est biaisé. C’est à cause de ce système-là que nous avons des distorsions
cognitives.
Nos intuitions
peuvent être fausses, il faut le retenir !
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